Le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau (à gauche), et le ministre de la justice, Gérald Darmanin, pendant la séance de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale. A Paris, le 18 mars 2025. SARAH MEYSSONNIER / REUTERS
« Nous ne sommes pas belliqueux, nous ne voulons pas la guerre avec l’Algérie. C’est l’Algérie qui nous agresse », a déclaré, mercredi 19 mars sur Sud Radio, le ministre de l’intérieur, Bruno Retailleau, à propos du refus par Alger de reprendre des ressortissants expulsables. « Il faut que l’Algérie ne barguine pas quand on est convaincu, avec une pièce d’identité, un passeport, que le ressortissant est Algérien. Elle doit le réadmettre », a insisté M. Retailleau.
En pleine crise diplomatique entre les deux pays, le locataire de Beauvau a plaidé pour « une réponse graduée » envers Alger arguant qu’« un ensemble de mesures pourraient être prises ». « La réponse graduée permet de dire “nous ne sommes pas l’agresseur” », a-t-il martelé. « Nous avons commencé à la mettre en œuvre avec la suspension des facilités à la nomenklatura algérienne », a ajouté le ministre, évoquant la « remise en cause des accords de 2007 » qui permettent aux détenteurs de passeports diplomatiques de ne pas avoir besoin de visa.
Alors que certains propos semblaient illustrer ces dernières semaines une divergence au sein de l’exécutif, notamment entre Emmanuel Macron et Bruno Retailleau, l’exécutif tente d’afficher la preuve de son unité sur le dossier. « La ligne est parfaitement raccord sur les trois niveaux » entre le « président de la République », le « premier ministre » et le « ministre de l’intérieur », et « cette détermination n’est pas remise en cause » « face à ces difficultés dans les relations avec l’Algérie », a notamment assuré mercredi la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, à l’issue du conseil des ministres.
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Des relations qui ne cessent de se dégrader
A la fin du mois de février, le premier ministre, François Bayrou, avait menacé de « dénoncer » l’accord de 1968, qui donne un statut particulier aux Algériens en France, l’ancienne puissance coloniale, en matière de circulation, de séjour et d’emploi, si, dans un délai de six semaines, l’Algérie ne reprenait pas ses ressortissants en situation irrégulière.
Toutefois, au début de mars, Emmanuel Macron avait paru vouloir jouer la carte de l’apaisement en se disant « favorable, non pas à dénoncer mais à renégocier » cet accord. Interrogé sur son éventuelle démission si le gouvernement renonçait à un rapport de force avec l’Algérie, M. Retailleau a répondu, mercredi matin, qu’« évidemment », « si un jour il m’arrivait de tomber sur un obstacle qui pourrait mettre en cause la sécurité de nos compatriotes, alors je devrais m’interroger ».
Les relations entre Paris et Alger ne cessent de se dégrader depuis la reconnaissance en juillet 2024 par Emmanuel Macron d’un plan d’autonomie sous souveraineté marocaine proposé par Rabat pour le Sahara occidental, territoire au statut non défini, selon l’ONU.
Actuellement, « le ministère des affaires étrangères est en train de travailler sur cette riposte graduée », et c’est le Quai d’Orsay qui déterminera « la façon dont nous la mettrons en œuvre », a détaillé Mme Primas à l’issue du conseil des ministres. Par ailleurs, « chacun est libre de faire des propositions », a déclaré la porte-parole du gouvernement, en réponse à une question d’un journaliste sur la demande du ministre de la justice, Gérald Darmanin, de rappeler l’ambassadeur français à Alger.
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Fin de non-recevoir d’Alger
Alors que l’Algérie a opposé lundi une fin de non-recevoir à la demande de la France de réadmettre une soixantaine d’Algériens sous le coup d’une obligation de quitter le territoire français (OQTF), les autorités algériennes doivent réadmettre leurs ressortissants pour amorcer « une relation plus constructive et équilibrée » entre les deux pays, a estimé mercredi le chef de la diplomatie française.
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« Il appartient, dans un délai qui a été fixé par le premier ministre à l’Algérie, de considérer cette liste et aux autorités algériennes de réadmettre ces ressortissants sur le fondement des accords » passés entre les deux pays, a déclaré Jean-Noël Barrot, devant le Sénat. « C’est ainsi que nous pourrons cheminer vers une relation plus constructive et équilibrée », a-t-il ajouté.
Il a répété que la France n’était pas à l’origine des dissensions avec Alger tout en soulignant que Paris voulait que ces tensions « puissent être résolues durablement ». « Mais ce n’est pas la France qui détient arbitrairement un ressortissant franco-algérien aujourd’hui, ce n’est pas la France qui refuse de réadmettre des ressortissants qui se trouvent en situation irrégulière sur notre sol, alors même que les accords qui régissent notre relation prévoient que ces réadmissions puissent se faire sans difficultés particulières », a ajouté M. Barrot.
Le Monde avec AFP
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