Un policier brandit son arme pendant une opération des forces de l’ordre dans la favela de Vila Cruzeiro, dans le quartier de Penha, à Rio de Janeiro, au Brésil, le 28 octobre 2025. MAURO PIMENTEL / AFP
Une opération policière menée, mardi 28 octobre, dans des favelas de Rio de Janeiro contre l’un des gangs de narcotrafiquants du Brésil est devenue la plus meurtrière de l’histoire de cette grande ville du sud-est du pays. Au moins 64 personnes sont mortes dans ces raids qui ont donné lieu à des tirs intenses, des barricades et des incendies.
Les opérations meurtrières des forces de l’ordre sont, malgré leur efficacité contestée, fréquentes à Rio. Elles visent notamment les favelas, quartiers pauvres et densément peuplés vivant souvent sous le joug de trafiquants de drogue.
Mais l’opération de mardi, par son ampleur et sa violence, a créé un choc. Jusqu’au Haut-Commissariat des Nations unies aux droits de l’homme, qui s’est dit « horrifié » et a demandé des « enquêtes rapides ».
Lire aussi | Article réservé à nos abonnés Au Brésil, la difficile lutte pour la justice des familles de mineurs tués par la police
Le raid, mobilisant 2 500 agents, s’est concentré sur deux ensembles de favelas du nord de Rio – les quartiers de Penha et d’Alemao –, situées à proximité de l’aéroport international. Le gouverneur de droite de l’Etat de Rio, Claudio Castro, a annoncé que « 60 criminels » avaient été « neutralisés ». Quatre policiers ont été également tués, a dit à l’Agence France-Presse (AFP) une source au sein de ses services.
Table des matières
Des bus utilisés comme barricades
A l’hôpital Getulio-Vargas, d’où l’on entendait les rafales tirées non loin, un défilé ininterrompu de véhicules déposait devant l’entrée des cadavres et des blessés par balle, policiers, délinquants présumés ou simples habitants, a constaté un photographe de l’AFP. A Vila Cruzeiro, une favela de Penha, des policiers lourdement armés gardaient une vingtaine de jeunes hommes interpellés. Serrés les uns contre les autres, ils étaient assis par terre la tête baissée, pieds et torse nus.
Plusieurs ministres du gouvernement fédéral se sont réunis à Brasilia pour évaluer la situation, décidant qu’une délégation se rendrait à Rio pour une « réunion d’urgence », mercredi. Jusqu’à présent, l’opération policière la plus meurtrière à Rio, ville de plus de 6 millions d’habitants, avait eu lieu durant la pandémie de Covid-19, en 2021, quand 28 personnes étaient mortes en une seule journée dans la favela de Jacarezinho.
Lire aussi le reportage | Article réservé à nos abonnés A Rocinha, la favela la plus densément peuplée du Brésil
Le gouverneur a aussi annoncé l’arrestation mardi de « 81 criminels », ainsi que la saisie de 100 fusils d’assaut et d’« une énorme quantité de drogue ».
L’opération a entraîné la fermeture d’une quarantaine d’écoles, tandis que l’université fédérale de Rio de Janeiro, située à proximité d’une des favelas concernées, a annulé ses cours et demandé aux personnes présentes sur le campus de se mettre à l’abri. « Plus de 200 000 résidents demeurent affectés par la fermeture des écoles et par celle des unités de santé », a fait savoir, mardi, l’Assemblée législative de l’Etat de Rio.
Le Monde Mémorable
Testez votre culture générale avec la rédaction du « Monde »
Testez votre culture générale avec la rédaction du « Monde »
Découvrir
Newsletter
« A la une »
Chaque matin, parcourez l’essentiel de l’actualité du jour avec les derniers titres du « Monde »
S’inscrire
Le Monde Application
La Matinale du Monde
Chaque matin, retrouvez notre sélection de 20 articles à ne pas manquer
Télécharger l’application
Newsletter abonnés
« International »
L’essentiel de l’actualité internationale de la semaine
S’inscrire
Stratégie courante des gangs lors des affrontements avec la police, « plus de 50 bus ont été utilisés comme barricades », a précisé le syndicat des entreprises d’autobus de Rio.
Environ 700 morts par an
L’opération vise à « combattre l’expansion territoriale du Comando Vermelho [“commando rouge”] », l’une des principales factions criminelles du Brésil, implantée dans plusieurs Etats du pays, a précisé le gouvernement de l’Etat de Rio sur le réseau social X. Les policiers ont mobilisé deux hélicoptères, 32 véhicules blindés et « 12 véhicules de démolition » utilisés pour détruire des barricades.
Le gouverneur Claudio Castro a publié sur X une vidéo d’un drone lançant un projectile depuis le ciel nuageux. « C’est comme ça que la police de Rio est reçue par les criminels : avec des bombes lancées par des drones », a commenté cet allié de l’ex-président d’extrême droite Jair Bolsonaro, dénonçant un « narcoterrorisme ».
Lire aussi le reportage | Article réservé à nos abonnés L’Etat de Bahia, bastion de Lula, connaît une explosion des violences policières : « Leurs méthodes ressemblent souvent à celles d’une milice »
Dans une déclaration, 30 organisations de la société civile, dont Amnesty International, ont affirmé que l’opération « exposait l’échec » des politiques de sécurité brésiliennes. L’ONG Human Rights Watch au Brésil a déploré une « énorme tragédie » et réclamé l’ouverture d’enquêtes sur « chaque mort ».
« La politique de Claudio Castro traite les favelas comme des territoires ennemis, où règne le permis de tuer », a accusé le député de gauche, Henrique Vieira.
La commission des droits de l’homme de l’Assemblée législative de Rio a annoncé qu’elle exigerait « des explications sur les circonstances de l’action, qui a de nouveau transformé les favelas de Rio en un théâtre de guerre et de barbarie », selon Dani Monteiro, présidente de la commission.
En 2024, environ 700 personnes sont mortes lors d’interventions des forces de l’ordre à Rio, soit presque deux par jour.
Le Monde avec AFP

 
															
No comment yet, add your voice below!