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Concept flou, casting compliqué… Le gouvernement « technique », solution ou fausse bonne idée?

La piste d’un gouvernement d’experts qui ne seraient pas liés à des partis politique a repris de l’épaisseur ces dernières heures. Mais la manœuvre, rarissime en France, n’offre aucune assurance de sortir de la crise politique.

Quelques mots prononcés par Sébastien Lecornu qui pourraient donner des idées à Emmanuel Macron. Le Premier ministre démissionnaire a semblé définitivement lâché l’éponge ce mercredi soir sur France 2, appelant à nommer un gouvernement « complètement déconnecté des ambitions présidentielles de 2027 ».

De quoi faire revenir dans l’atmosphère l’idée d’un casting ministériel technique déjà évoqué à de multiples reprises à l’été 2024 après le fiasco de la dissolution. Mais de quoi parle-t-on vraiment? L’expression de gouvernement technique n’a aucune réalité juridique.

Elle n’apparaît par exemple nulle part dans la Constitution. En science politique, ces mots permettent de qualifier un gouvernement constitué de « personnes qui ne sont pas liées à un parti politique » comme le précise une note du centre de recherches politiques de Sciences-Po.

L’hypothèse a été mise sur la table à plusieurs reprises. Après le fiasco de la dissolution à l’été 2024, le nom de Thierry Beaudet, président du CESE (Conseil économique, social et environnemental) qui n’avait jamais exercé aucune fonction politique, était revenu sur la table.

« Certains se disent que si on a une personnalité qui n’est pas politique au sens partisan, ça peut faire bouger les lignes et permettre à la fin d’emmener largement le Parlement vers des accords », décrypte l’historien spécialiste de la Ve République Jean Garrigues.

En France, au moins une occurrence

La pratique est cependant rarissime en France. Ces dernières décennies, plusieurs personnalités de la société civile ont bien été nommées au gouvernement mais à jamais à Matignon et le plus souvent en guise de symbole.

L’avocat Éric Dupond-Moretti à la Justice et l’historien Pap NDiaye à l’Éducation nationale sous Emmanuel Macron, la documentariste Yamina Benguigi pendant le quinquennat de François Hollande, le président d’Emmaüs Martin Hirsch lors du mandat de Nicolas Sarkozy à l’Élysée…

Mais pour trouver le précédent d’un vrai gouvernement technique, il faut remonter à la IIIe République en 1877 avec le président MacMahon qui avait propulsé un gouvernement de fonctionnaires. Leurs profils: des « hommes étrangers aux derniers conflits, indépendants vis-à-vis de tous les partis », censés « rester en dehors des luttes politiques ».

La méthode visait alors à empêcher ses opposants, qui avaient gagné les élections législatives, d’accéder au pouvoir. Las: le gouvernement fut renversé une poignée de jours plus tard.

On peut aussi regarder du côté de nos voisins européens qui ont déjà eu des exécutifs techniques à plusieurs reprises cette dernière décennie comme en Belgique. La comparaison est cependant difficile en raison d’un paysage politique très éclaté et d’un pouvoir fédéral relativement fort.

L’exemple en Italie: le cas Draghi

Le cas de l’Italie, au système politique plus proche du nôtre, peut aussi être évoqué. En 2021, en pleine crise politique et financière liée à la démission du Premier ministre Giuseppe Conte, le chef de l’État italien propose ainsi à Mario Draghi qui n’a jamais eu aucun mandat électoral de le remplacer.

Cet ancien banquier passé par Goldman Sachs n’est pourtant pas vraiment un néophyte des allées du pouvoir. Un temps président de la banque d’Italie, ex-président de la banque centrale européenne qui a notamment géré la crise des subprimes en 2008… Cet professeur d’économie dispose d’un vaste réseau politique sur la scène italienne et internationale. Et Mario Draghi a beau avoir un profil technique, il ne fait pas vraiment table rase du passé en devenant le chef du gouvernement.

Il reconduit ainsi l’essentiel des ministres sortants et va chercher des profils assez proches du sien en nommant par exemple le directeur général de la banque d’Italie au ministère des Finances. La méthode lui permet cependant d’obtenir une vaste coalition.

Je suis « un grand-père » « au service des institutions », plaide encore Mario Draghi pour apparaître comme un homme au-dessus des partis. Bon an mal an, le gouvernement tient en tentant d’appliquer plusieurs réformes exigées par Bruxelles pour assainir sa situation économique.

« Un miracle »

18 mois plus tard, Mario Draghi est cependant contraint de s’en aller, faute d’être parvenu à garder le mouvement 5 étoiles, l’un de ses partenaires à ses côtés, ouvrant de nouveau une crise politique. Conclusion: vu de l’Italie, le gouvernement technique n’est pas la panacée pour sortir du marasme dans lequel est plongée la France.

« Si on tient 18 mois, ça permet d’aller jusqu’à la prochaine présidentielle, ce serait franchement un miracle vu le contexte et ça permet qu’on évite des calculs trop partisans », défend cependant un député macroniste.

En nommant un gouvernement technique, Emmanuel Macron pourrait en effet faire le pari qu’une large parti de l’hémicycle accepterait de ne pas censurer un exécutif sans couleur politique claire.

Reste cependant que le budget de l’État et de la sécurité sociale relèvent de choix politiques, comme le montre la demande des socialistes de suspendre la réforme des retraites pour ne pas censurer le futur gouvernement.

« Moi, des gens qui n’ont aucun avis sur rien et qui deviennent ministres ou Premier ministre, je n’en connais pas. Un gouvernement technique, ça n’existe pas », tranche le président des sénateurs macronistes François Patriat.

D’autres craignent que l’image apolitique d’un gouvernement n’enfonce encore plus le pays dans la crise politique. Sans étiquette politique, qui devient in fine responsable du bilan des ministre? Potentiellement, plus grand-monde.

« Est-ce que cela n’ouvre pas les portes à la censure sur tous les bancs, en se disant ‘on ne connaît pas cette personne, on ne lui doit rien?’. Je ne sais pas », reconnaît un élu LR.

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Peu de volontaires

Et si Emmanuel Macron se lançait dans l’aventure d’un gouvernement technique, il resterait encore à trouver le casting. Ces derniers mois, de nombreuses hypothèses ont circulé autour Christine Lagarde, présidente de la BCE dont le mandat court jusqu’en 2027. Difficile cependant de voir vraiment en elle une figure déconnectée de la politique alors qu’elle a été ministre sous Jacques Chirac puis Nicolas Sarkozy.

Pour l’instant, les candidats hors partis candidats pour arriver à Matignon, ne se battent pas vraiment au portillon

« Quelle personnalité un peu au-dessus de la mêlée veut lâcher son travail pour aller à Matignon et tomber dans quelques semaines? À mon avis, peu de personnes », reconnaît une ancienne ministre LR.

Matignon, « pas le rêve » de Laurent Berger

Un nom a pourtant émergé ces derniers jours, celui de Laurent Berger. L’ancien patron de la CFDT, avait déjà approché à l’été 2024 pour devenir Premier ministre, avant de refuser. L’ancien patron de la CFDT semble depuis avoir tourné la page de la politique en prenant la direction d’une branche de la banque CIC au printemps dernier.

L’ex-syndicaliste a ainsi refusé de prendre la tête d’éventuelles négociations sur le budget la semaine dernière comme lui avait suggéré l’ancien Premier ministre Gabriel Attal. Son arrivée à Matignon semble désormais relativement improbable.

« Son rêve ne se situe pas dans le quartier des ministères », confie son entourage.

Le chef de l’État pourrait aller chercher un profil proche de celui de Jean Castex, alors totalement inconnu du grand public à sa nomination à Matignon. Ex-collaborateur de Nicolas Sarkozy à l’Élysée, ce haut fonctionnaire avait appris à connaître le chef de l’État lorsqu’il est devenu chargé de la stratégie de déconfinement liée au Covid-19 en 2020. Arrivé aux manettes, Jean Castex avait cependant bien choisi un gouvernement composé de politiques.

Quel choix fera cette fois le chef de l’État? Réponse peut-être rapidement: Emmanuel Macron a promis de nommer un Premier ministre d’ici vendredi soir.

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