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Archives vintage et effets spéciaux: comment « L’Inconnu de la Grande Arche » recrée le Paris des années 80

Le cinéaste Stéphane Demoustier livre un film sur le chantier titanesque de la Grande Arche, en salles ce mercredi. Récit d’un tournage ambitieux qui mêle vintage et effets spéciaux.

Des automobiles du temps d’avant balaient continûment l’avenue pavée des Champs-Élysées, encadrée par une rangée d’arbres altiers. Au milieu, deux hommes, l’architecte danois Johan Otto von Spreckelsen (joué par Claes Bang, déjà vu dans The Square de Ruben Östlund) et le président de la République de l’époque, François Mitterrand (Michel Fau), sont posés là, de part et d’autre de la ligne blanche. Le premier pointe l’horizon, le second l’observe. Au loin, l’autoritaire Arc de Triomphe et, peut-être, encore plus en arrière-plan, l’ombre de la Grande Arche.

Cette scène-carte postale des années 80 de L’Inconnu de la Grande Arche, cinquième long-métrage de Stéphane Demoustier, projeté à Cannes cette année, qui retrace l’histoire tragique et oubliée de l’architecte danois, catapulté chef de l’énorme chantier mitterrandien de la Grande Arche, est peut-être le cœur du film. Ou résume au moins à elle seule le degré de précision de son cinéaste, qui a reconstruit, patiemment, comme rarement dans le cinéma français, le Paris d’antan.

Trois heures sur les Champs

« Je voulais absolument qu’on tourne sur les Champs pour que le spectateur puisse comprendre et visualiser cet axe royal allant du Louvre à l’Arc de Triomphe, cette perspective dont les personnages parlent sans cesse. Il fallait que le film rende les choses tangibles, perceptibles, confie Stéphane Demoustier à BFMTV.com. D’autant que cette scène s’est réellement produite. »

Pour cela, le cinéaste a longuement féraillé avec les autorités pour obtenir un accès total, trois heures durant, à l’avenue, un dimanche matin ensoleillé (« un miracle », dit-il). Il a ensuite fallu faire venir une flopée de collectionneurs de voitures des années 70 et 80, leur demander de s’habiller comme à l’époque, « car ce sont eux qui les conduisent à l’écran », précise-t-il, et organiser méticuleusement leur ronde sur les Champs et ce, avec des « talkies-walkies ».

Coût total de l’opération: 300.000 euros – sur un budget total de 6,5 millions d’euros, bien loin donc des 2,7 milliards de francs consacrés à la construction de la Grande Arche.

Drame politique

Stéphane Demoustier, qui s’est librement inspiré de l’ouvrage de la romancière Laurence Cossé, La Grande Arche, publié en 2016, a aussi « eu la chance », dit-il, de pouvoir tourner dans l’antre de l’Élysée, à La Défense, à la préfecture des Hauts-de-Seine et des Yvelines, au Louvre (où se situait à l’époque le ministère du Budget) ainsi qu’au Danemark et dans les mines de marbre de Carrare. « On a eu accès à des lieux patrimoniaux qui donnent toute son assise à l’histoire et qui, petite aubaine, n’ont pas beaucoup changé depuis les années 80 », insiste l’intéressé.

Car, L’Inconnu de la Grande Arche est certes un mélodrame architectural et intime, mais aussi un grand film politique, sur les coulisses du pouvoir, le basculement dans le néolibéralisme, la fin de l’ère romantique, les contraintes économiques et administratives, les décisions contradictoires au sommet de l’État, les blocages entêtants de la Ve République, qui « font grandement écho » à la situation parlementaire actuelle, soutient Demoustier.

Johan Otto von Spreckelsen, cet inconnu qui a remporté en 1983 à la surprise générale, à 53 ans passés, le concours d’architecture pour bâtir la Grande Arche de La Défense, a vu ses grandes ambitions freinées par la première cohabitation, de 1986 à 1988, et le retour au pouvoir de la droite. Esseulé, peu aidé par ses pseudo-alliés (joués notamment par Swann Arlaud, architecte pragmatique et jaloux, et Xavier Dolan, qui marque son grand retour au cinéma en tant qu’acteur depuis 2021), incapable de mener à bien son projet, le Danois y laissera sa santé et son idéalisme, démissionnera et mourra d’un cancer peu avant l’inauguration du cube vitré.

Effets spéciaux

Autre prouesse du tournage, si ce n’est la plus grande, la plus épique, reconstituer le chantier titanesque de la Grande Arche. « Je voulais absolument qu’on sente qu’il était immense parce que c’est l’histoire d’un type écrasé par sa propre œuvre, accablé par ce gigantisme », explicite le cinéaste.

La reconstitution, avec des effets spéciaux et des images d’archives, du chantier de « L’Inconnu de la Grande Arche » © Agat Films, Le Pacte

Faute de budget suffisant, Stéphane Demoustier et ses équipes choisissent non pas de tourner à La Défense puis de retirer en post-production tout ce qui n’existait pas à l’époque, mais de recréer des morceaux de chantier dans un studio gadouilleux en plein air, à Coulommiers pour les plans serrés. Et de compléter ces images par des plans plus larges du site, fabriqués à partir d’images d’archives et d’effets spéciaux numériques. Ces derniers ont notamment permis de replacer la tour Fiat ou le Cnit, premier bâtiment construit à La Défense en 1958, dans le film.

« C’était plus simple et moins onéreux d’ajouter le décor de La Défense d’antan que d’enlever La Grande Arche d’aujourd’hui du décor », résume le réalisateur, qui précise que cette technique de reconstitution est, à sa connaissance, inédite en France. Les effets spéciaux et la reconstitution des décors en studio ont coûté chacun un peu plus de 500.000 euros. Un exploit apparemment technique, visuel mais aussi budgétaire donc.

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